Après l’avoir ignoré plusieurs fois, Mi Yon avait fini par faire remarquer à son vis-à-vis que son téléphone sonnait depuis quelque temps. Elle ne savait guère s’il ne l’avait pas remarqué de lui-même, ou s’il faisait justement exprès de faire tout comme. Avait-il peur d’être dérangé ? Leur mini tête à tête n’avait rien de très intime, et ils se connaissaient à peine. Il ne devait pas se déranger pour elle jusqu’à en oublier ses obligations. Personne ne savait s’il s’agissait ou non de sa possible petite amie, mais celui ou celle qui tentait de le joindre se faisait bien insistant, ce qui avait tendance à l’agacer. D’un signe de la main, Mi Yon tenta de lui faire comprendre qu’il pouvait parfaitement répondre. Elle se demandait même pourquoi il n’avait pas décroché plus tôt … « Hmm, ne t’en fais pas. Ce n’était pas prévu non plus que nous nous rencontrions dans un bar. Je t’attends. » Elle ne pouvait faire que ça, de toute façon. Ce n’était pas comme si elle allait en profiter pour quitter le bar, et partir sans même dire au revoir alors qu’il venait de lui offrir un verre. Elle n’était pas des plus gentilles filles, Mi Yon, elle avait déjà – par le passé – eu son quota d’égoïsme, et de malfaisance. L’exemple de Yun Ah était d’ailleurs parfait, malheureusement … Mais malgré tout ça, ce n’était pas non plus une connasse, et elle n’allait pas partir comme une voleuse. Ironie du sort, un peu, quand on savait qu’il s’agissait justement d’un policier en face d’elle. Quelques minutes de solitude, tandis qu’il téléphonait, qui permettait à la jeune blonde d’avancer dans la consommation de sa boisson. D’organiser un peu mieux ses pensées qui dérivaient sur ses parents à qui elle n’avait pas dit un mot depuis des lustres, avant que Taehyung ne revienne. Plongée dans sa réflexion, elle avait à peine vu le temps passer. Ou bien avait-il justement été très rapide dans sa conversation. La mine du jeune homme est triste, Mi Yon hausse un sourcil. Son paternel lui aurait-il annoncé une mauvaise nouvelle pour qu’il tire cette tête-là ?

Taehyung arrive à lui décrocher un dernier sourire, en coin.  C’était un garçon curieux à son égard, et ça la faisait toujours sourire quand cela arrivait. Néanmoins, cela signifiait aussi qu’elle allait devoir poser clairement les grandes lignes de cette vie qu’elle s’inventait depuis son arrivée sur l’île coréano-japonaise s’il elle venait à devoir en dire un peu plus sur sa personne que le strict minimum qu’elle avait déjà raconté. Il lui tendit une serviette sur lequel il venait d’écrire un numéro qu’elle devina le sien avant même qu’il ne le lui annonce. Elle attira l’objet à elle, et releva les yeux vers lui. Si seulement il savait … Hochant positivement la tête et implicitant ainsi le fait qu’elle l’appellerait si besoin, Mi Yon se demandait si elle ne devait pas clairement lui annoncer maintenant qu’elle ne possédait pas de téléphone. Etait-ce seulement vraiment nécessaire ? Si elle ne comptait pas l’appeler, elle pouvait bien omettre ce détail là, non ? « Je le ferai, alors. » Même si elle ne pensait en aucun cas avoir besoin d’un guide – Yong Min était parfaitement fait pour ce rôle – et encore moins d’un policier. Par le passé, elle les avait toujours fuis, elle les avait toujours détestés, et ce n’était pas aujourd’hui qu’elle allait tout faire changer. « Merci. Et à bientôt, peut-être. » Ce n’est pas une promesse qu’elle lui fait. Le peut-être est à peine pensé. Elle était fortiche dans le domaine, quand il était question de donner de faux espoir. Malgré tout, même à peine pensé, c’était sorti de ses lèvres. Il existait donc possiblement une petite chance pour qu’elle ait effectivement envisagé, un jour, de recroiser son chemin. Sa compagnie était gênante, mais pour le moment, elle n’était pas désagréable. Ce n’était qu’une question d’habitude qu’elle n’avait pas, Mi Yon.

Il s’en va, il la laisse là. Il paie, puis passe le pas de la porte d’entrée du bar. La coréenne lâche un fin soupir avant de se laisser aller contre le dossier de sa chaise. A partir de là, elle avait attendu que le temps avance de lui-même, que sa soirée se finisse avant de rentrer. Elle avait lentement fini ce cocktail à la cerise, et avait fini par quitter sa place une bonne heure après le départ du policier. Peut-être recroiserait-elle sa route, ou peut-être que non, seul le temps le lui dira.