D'un pas nonchalant, Tae Oh rentrait chez lui, après une assez longue journée de travail. Il n'était pas de mauvaise humeur, mais cette dernière n'était pas forcément bonne non plus. Peut-être était-il juste trop fatigué pour savoir exactement son état d'âme ? Quoi qu'il en soit, il valait mieux pour tout le monde que sa soirée se passe sans encombre, sous peine d'avoir affaire à un Tae Oh pas très supportable.

Dans un soupir non retenu, le jeune mannequin passait le pas de la porte d'entrée de son bâtiment, se dirigeant tout d'abord en direction des boîtes aux lettres des différents habitants de la bâtisse. Il n'avait pas pensé à récupérer son courriel la veille, ni l'avant veille, et ne donnait pas cher du nombre de lettres qui devait s'empiler dans la petite case. Bien évidemment, la plupart du temps, il s'agissait de flyers, ou de magazines publicitaires, mais il ne fallait pas non plus qu'il oublie de vérifier régulièrement. Parmi tout ça pouvait bien se cacher une facture par-ci, une fiche de paie par-là, sans oublier les magazines auxquels lui-même s'était abonné, ou bien ceux pour lesquels il avait posé. Avec la motivation d'une personne souhaitant le plus vite possible rentrer chez lui, le brun s'empêcha d'ouvrir sa boîte aux lettres, et sans même y jeter un coup d'œil, il attrapa sans réfléchir la pile de papier, avant de la refermer et de se rendre rapidement dans son appartement.

Quelques minutes plus tard, les lettres et autres papiers et magazines s'étaient retrouvés abandonnés sur la table du salon, tandis que le jeune homme profitait de son retour chez lui pour aller se doucher, puis ensuite faire un peu de rangement dans son appartement qui commençait à légèrement se faire bordélique. Heureusement que son frère ou même sa belle-sœur n'était pas venue récemment, il aurait croulé sous les remarques sinon. Vivre seul n'impliquait pas vivre dans un bordel, même organisé. En rangeant, il avait mis de côté les quelques fioles vides des échantillons qu'avait pu gentiment lui offrir Mademoiselle Mariko, lorsqu'il s'était rendu dans sa boutique. S'il se souvenait bien, il ne lui restait plus qu'à finir le shampooing pour pouvoir lui rendre le tout. Il n'avait eu aucune réaction, et avait même plutôt bien apprécié les différents produits. Il lui en achèterait à l'avenir. Il pourrait aussi en proposer à Yoo Hwan, tiens. La prochaine fois qu'ils passeront tous deux dans le coin, il lui en parlera, s'il n'oubliait pas d'ici-là.

Habillé d'un simple boxer, Tae Oh était retourné dans son salon, prêt à reprendre la série qu'il avait entamé la veille. Néanmoins, son regard reposé sur son courriel, il lâcha un soupir. S'il ne s'en occupait pas maintenant, il ne s'en occuperait pas forcément plus (+) plus tard. Il attrapa la première enveloppe : pub. La suivante : pub. Pub, pub et encore pub. A croire que même l’étiquette « Pas de Publicité SVP » n’avait aucune répercussion sur le contenue de sa boite aux lettres. Au final, une bonne partie finissait à la poubelle, les quelques papiers administratifs du tas se retrouvant de côté. Parmi tout cela, une enveloppe sortait du lot. Pas de destinataire, pas d’expéditeur, l’emballage était blanc comme neige. Perplexe, il l’ouvrit. Rien ne lui disait qu’il y aurait forcément quelque chose à l’intérieur aussi. Peut-être qu’il s’agissait là d’une blague d’un gamin de l’immeuble, qui avait voulu faire perdre son temps au mannequin … Pourtant, la feuille qu’il sortit de l’enveloppe l’intrigua encore plus. Trois lettres noires, en majuscule, trônaient au centre. « A ... O ... A … ? » Il haussa un sourcil. C’était la première fois qu’il voyait ces trois lettres se suivre de la sorte, et il était loin d’en connaître la signification. Un rapide coup d’œil au verso lui permit cependant d’éclairer sa lanterne. « Agent Of Aikoyangi. » Il fit une pause dans sa réflexion avant d’aller s’asseoir sur son canapé, son téléphone attrapé au passage. Qu’est-ce que cela signifiait ? Tout en se mordant la lèvres inférieur, Tae Oh cherchait sur internet de possibles explications à cet acronyme, et ce à quoi il correspondait exactement d’après le papier. Il n’avait strictement aucune idée de pourquoi on avait mis ça dans sa boite aux lettres, mais ce qui était sûr, c’est que le fait qu’il n’y ait ni destinataire, ni expéditeur, montrait que ce n’était pas un courriel comme un autre. Est-ce que ces voisins avaient eux aussi reçu cette étrange lettre ? Ou était-il le seul … C’était vraiment bizarre. En plus de tout cela, ses recherches sur internet ne le menaient à rien. Il n’y avait aucune indication, ni même détail, sur ce qu’étaient exactement ces « Agents » de l’île. En tout cas, c’est qu’il devait bien en exister, si un acronyme de ce genre existait. Peut-être allait-il en parler à Yoo Hwan ? Après tout, son ami avait beaucoup plus de connaissances que lui dans tous les domaines, peut-être avait-il déjà entendu parler des « AOA » ? Mais n’était-ce pas un peu hâtif de lui en parler maintenant ? Personne ne lui interdisait de le faire, mais il avait comme ce mauvais pressentiment qu’il ne pouvait pas en parler non plus énormément autour de lui. Même à Makoto à qui pourtant il disait tout.

Tae Oh verrouilla son téléphone qu’il déposa à coté de lui sur le canapé. Peut-être aussi qu’il prenait soudainement ce simple morceau de papier un peu trop au sérieux, et que ce n’était qu’une farce pour lui faire perdre la tête l’espace d’un instant tant son cerveau s’était mit à réfléchir à toutes les possibilités qu’ils pouvaient bien avoir autour de cet acronyme. Oui, c’était surement ça. Tout ce qu’il s’imaginait correspondait à des scénarii tous droits sortis des films qu’il avait pu voir avec son frère et Makoto. Il rangea soigneusement le papier dans son enveloppe d’origine et, après avoir hésité un court instant quant à sa destination future, il l’abandonna dans le tiroir de la commode de son salon. Il aurait pu la jeter, mais comme tout à l’heure, il avait l’impression que cette étrange lettre n’avait pas atterrie par hasard chez lui, et que la jeter s’avèrerait être une erreur …