J'avais décidé de ne pas ouvrir la boutique,  aujourd'hui. Trop de monde en ville pour le festival qui offrait plein de bonne nourriture, je savais que rester ouvert ne servirait à rien. L'avantage de ne pas travailler aujourd'hui était que j'allais pouvoir visiter le festival, et éventuellement m'amuser. Peut-être même croiser Sun Hae. C'était principalement pour cette possibilité que j'avais fait un minimum attention à ce que je mettais comme vêtements. Il fallait que je sois un minimum impeccable.
J'étais sorti plutôt tôt et me baladais tranquillement, les mains dans les poches de mon jean, observant les alentours, les stands -surtout ceux de nourriture, concurrence déloyale- lorsqu'on me prit brusquement le poignet. Je n'eus pas le temps de comprendre ce qui se passait que je me retrouvais enchaîné à une personne. Qui se mit très vite à agiter nos mains. Légèrement agacé, je levais le regard et. Oh. Je me souvenais d'elle. De son immonde chien. Et de son caractère affreux. Je regrettais déjà toute ma vie, alors qu'elle me demandait si j'avais les mains propres. De plus en plus agacé, je lui répondis, un peu brutalement : « En tant que pâtisser, je me lave les mains très fréquemment, alors oui. Et vous ? » Mon regard passa de l'enveloppe au visage de la jeune femme qui me regardait aussi. Il y eut un blanc puis elle sembla changer d'avis, se mettant à essayer d'ouvrir l'enveloppe. D'une main et de ses dents. Je ne pus m'empêcher de ricaner en voyant ses efforts totalement vains. Je la laissais galérer quelques instants avant de finir par avoir pitié d'elle -puis bon, j'avais très envie de lire cette lettre, aussi, qui devait sans doute expliquer cette situation- et saisissais l'enveloppe alors qu'elle la tenait encore entre ses dents. « Mords fort. » Je mettais mis à la tutoyer naturellement, décidant qu'elle n'était pas une cliente à l'heure actuelle et qu'elle-même me tutoyait -de manière très insolente, d'ailleurs-. Une fois qu'elle eut une belle prise sur l'enveloppe, je tirais et le papier se déchira, laissant tomber un morceau de papier plié. Sans la prévenir, je m'accroupis, l'entraînant avec moi de manière très planifiée -c'est petit mais ça fait du bien- et récupérais la lettre par terre, me redressant aussi vite, la secouant.
Une fois redressé, je lus la lettre à haute voix. Puis eut une pause. Notre tâche ne me donnait pas du tout envie... Mais bon. Si je ne le faisais pas, je ne me débarrasserai pas d'elle. Avec un haussement d'épaules, je froissais la lettre et la jetais dans la poubelle la plus proche. « Bon, puisque nous sommes bloqués et que je n'ai vraiment pas que ça à faire, autant se mettre au boulot tout de suite ! » Je regardais autour de moi et avisais le stand le plus proche -un de bonbons, le traître- et tirais ma compagne forcée devant ce stand, nous plaçant devant des sucettes en forme de cœur. Je passais ma main attachée à la sienne derrière elle, la tenant par la hanche et sortit mon portable de ma main libre, ouvrant l'appareil photo : « Et on sourie...! » J'attendis à peine avant de me pencher vers elle, déposant un baiser sur sa joue alors que je prenais la photo.
Dès que ce fut fait, je m'éloignais et la lâchais, grimaçant : « Bon Dieu, c'était dur... Plus que quatre, tu t'occupes de la prochaine, il faut que je me remette de ce que je viens de vivre... » C'était en réalité, moins le geste qui me gênait -je flirtais beaucoup, surtout avant d'arriver sur cette île- mais plus le fait que ce n'était pas Sun Hae... Pour la première fois, j'avais envie de flirter avec une personne en particulier et me retrouver à faire ça avec une autre... C'était légèrement désagréable.

Tenue (sans le masque)

Bloqué. J’étais bloqué. Très littéralement puisque j’étais attaché à une espèce de femme au caractère insupportable que j’avais très envie d’envoyer balader. Sauf que si je l’envoyais balader… J’allais balader avec elle. Mais il n’empêchait que j’avais envie de me débarrasser d’elle. Je ne la supportais pas, surtout avec ses petites manières et sa façon de toujours avoir le dessus et de tout ramener à elle. C’était le genre de personne que j’aimais psychoanalyser mais qui me rendait dingue malgré tout. Et vu que je n’avais pas de raison de cacher mon agacement et mon dégoût de ladite personne – ou du moins de sa personnalité – je n’essayais pas d’être discret ! Et si, réflexion faite, j’arrivais à un peu m’amuser avec elle… Alors ça allait être encore mieux. Plus ma vengeance était petite et malsaine et mieux je me sentirai. Tant pis si je perdais une cliente. Ce n’en était qu’une seule. Et je doutais qu’elle ait des amis qu’elle influence suffisamment pour les dissuader de venir dans ma boutique. Je recevrai peut-être des félicitations, cependant…
Je me laissais guider jusqu’à un stand de bijoux et ne fit pas un seul geste pour payer à la place de ma compagne – galanterie oubliée, j’avais juste envie de lui foutre mon poing dans sa jolie petite figure – et ricanais en la voyant essayer d’enfiler son bracelet. « Ahlala, même pas capable de faire quoi que ce soit seule… Pitoyable... » C’était très petit. Mais ça faisait du bien. Énormément de bien. J’aidais cependant ma compagne d’infortune à mettre son bracelet avant de mettre le mien d’une main. J’avais l’habitude. Une fois la photo prise – sourires faussement ravis en place – je repris les choses en main et l’emmenais jusqu’à un stand de petits bibelots. Un gros cœur en bois de cerisier était accroché au niveau de l’auvent du stand. Une idée me vint et j’avisais le vendeur, lui demandant de prendre une photo de nous, de l’extérieur de son stand. Lui tournant le dos, je me collais à ma compagne, la main menottée à la sienne posé sur sa hanche et ma tête légèrement appuyée contre la sienne – j’étais suffisamment sympa pour ne pas appuyer de tout mon poids. De ma main libre, je désignais le cœur en bois et, alors que le vendeur faisait un décompte, j’attendis le dernier moment pour descendre légèrement ma main, de la hanche de la créature à mes côtés jusqu’à sa fesse du même côté, ne pouvant retenir un petit ricanement en sentant sa réaction.
Une fois la photo prise et vérifiée – nous avions l’air si heureux – je m’éloignais à nouveau et entraînais ma compagne plus loin. « A ton tour, maintenant. Plus que deux. »

Tenue (sans le masque)

Je jouais avec le feu, je le savais mais je ne pouvais m’empêcher de m’amuser en faisant ça. C’était tellement jouissif d’être un connard, parfois. Ça me manquait. Sun Hae était presque imperméable à mes coups bas et je me devais d’être poli avec les clients. Je savais que, en l’occurrence, j’étais avec une cliente – même si elle n’était venue qu’une fois – mais je n’avais pas du tout envie de la revoir, celle-là. Son souvenir restait impérissable et je préférais ne plus jamais passer la porte de la boutique, quitte à lui laisser une très mauvaise impression, que de faire semblant de l’apprécier. Elle ne faisait pas semblant d’être une chieuse, elle. Je laissais ma compagne d’infortune me guider ailleurs, fronçant les sourcils devant son surnom. Je n’avais rien d’un chou à la crème… Certes, j’étais légèrement bronzé et j’avais actuellement les cheveux blonds mais nous n’avions rien à voir. Je me doutais bien qu’elle ne pensait pas à ça mais c’était la seule image qui me venait en tête. Un chou à la crème. Je détestais cette pâtisserie et fronçais un peu plus les sourcils en repensant à cette… chose. Heureusement – ou pas – la chieuse me fit rapidement oublier cette mauvaise pensée. J’avais sans doute raté un train ou quelque chose pour soudainement me retrouver avec les lèvres de la jeune femme plaquées sur les miennes. Sans réfléchir, je fermais les yeux et la laissais m’embrasser, faisant semblant d’agir alors que je ne faisais strictement rien. Lorsque nous nous séparâmes, je vérifiais la photo avec elle puis fronçais un peu plus les sourcils. « J’ai franchement connu des mecs qui embrassaient mieux que ça. Mais tu te débrouilles pas mal ! Encore un peu d’entraînement et tu serais parfaite, cocotte. » J’avais soudainement l’image d’un gâteau aux macarons en forme de poule que j’avais confectionné, une fois. Je ne pus retenir un petit rire en entraînant ma partenaire plus loin. Je m’arrêtais soudainement devant un stand de chocolat chaud. « Est-ce que je peux vous piquer un peu de crème fouettée ? » demandais-je au commerçant. Celui-ci ayant approuvé, je lui confiais le portable qui contenait nos photos et saisis la main libre de ma compagne, la forçant à tendre son index que je fis tremper dans de la crème fouettée. Puis, un sourire aux lèvres, je léchais son doigt, veillant à en mettre sur ma lèvre supérieure, avant de plonger en avant pour l’embrasser aussi, à mon tour, sentant la crème s’étaler sur sa propre lèvre supérieure. Le flash retentit mais j’attendis un peu pour me détacher, donnant un baiser le plus langoureux possible à la chieuse. Certes, je ne l’aimais pas, mais je ne voulais pas qu’elle m’oublie si facilement. Je m’écartais, toujours souriant : « Pour que tu ne m’oublies pas, cocotte. »
Une personne de la sécurité s’approcha alors de nous et prit le portable, vérifiant les photos puis, apparemment satisfait, nous détacha sans un mot. Une fois libéré, je m’éloignais aussitôt d’un pas, mettant enfin un peu de distance entre cette créature et moi. « Bon, j’espère ne plus jamais te revoir, toi. Ce fut une horrible journée, je ne te remercie pas d’y avoir contribué. »

Tenue (sans le masque)

HRP:

J'avais beau m'être un peu amusé à torturer ma partenaire d'infortune, j'étais malgré tout extrêmement heureux de me débarrasser d'elle. J'allais m'éloigner lorsque l'insupportable voix de la jeune femme m'arrêta aussi net. Je me retournais lentement, sentant déjà les ennuis arriver au quintuple galop. Et j'avais raison. Elle s'effondra vite au sol, m'accusant de casser avec elle le jour de la saint-valentin. J'allais m'enfuir lorsqu'elle se saisit de ma jambe. Son contact m'emplit de colère et je me libérais sèchement, avec une furieuse envie de lui mettre mon poing dans sa tronche. Mais nous étions en public et je ne pouvais pas me permettre de lui faire du mal comme ça, j'étais un vendeur, je me devais d'avoir une réputation parfaite. Mais, alors que je m'éloignais en direction de la pâtisserie, je décidais de me renseigner sur elle. Demain, j'allais poser des questions à Sun Hae, pour avoir le nom de la connasse. Et, une fois que j'aurai son nom, je n'aurai aucun mal à avoir son adresse.
Une vague d'excitation m'envahit. J'avais désormais hâte de pouvoir rendre visite à la jeune femme. Peut-être serait-elle même ma prochaine victime, qui sait...?
Tenue (sans le masque)